Sans polémiques, la France ne serait plus la France, mais il y a des moments où il faut savoir faire silence.
Pour moi, les souvenirs de la commémoration de ce tragique événement ne se limitent pas à l’expression bienvenue du Président Jacques Chirac ou la clarification apportée par François Hollande.
Je reste glacé par la colère de Robert Badinter lorsqu’il voulut que ce jour-là, ceux qui critiquaient François Mitterrand pour son amitié avec René Bousquet, qui joua un rôle déterminant dans la rafle, se taisent devant les morts.
Il me semblait sain et juste d’observer la même attitude alors que nous avons tous le nez sur Twitter, autant à relayer d’autres hommages qu’à surveiller, sous pour être confortés dans nos préjugés ou nos convictions, qui dit quoi et comment.
Qu’il s’agisse des tweets maladroits du Premier secrétaire du Parti socialiste que de ceux de la Présidente du groupe France Insoumise à l’Assemblée nationale ou d’une députée écologiste de Paris, ceux qui se sont persuadés que la gauche radicale était antisémite et qu’elle avait phagocyté le PS ont pu être grandement servis.
Face à de tels événements, il ne faut pas chercher à être original ni se précipiter parce qu’on veut être repris et faire partie des « tendances ». Cette attitude de courtiers en bourse ne sied ni à l’événement ni à la gauche telle qu’on se l’imagine.
Outre l’obligation de prudence, il y a une nécessité dans la précision et pour cela, soit on est un expert du sujet, soit on s’appuie sur des collaborateurs payés pour être prudents et cultivés, soit on se renseigne.
Quand je travaillais pour des responsables politiques socialistes, nous anticipions les événements, nous préparions ces expressions et chaque mot était pesé afin de ne pas laisser de prise aux interprétations malveillantes. Nous ne considérions jamais qu’il ne fallait pas en tenir compte. Plus on est précis, plus la mauvaise foi des détracteurs est évidente.
Le fait qu’une députée LFI fasse venir Jeremy Corbyn sur une campagne électorale à Paris, sachant pertinemment ce qui lui était reproché et comment une partie de la gauche réagirait relevait d’un choix assumé ou d’une provocation.
Corbyn, par son attitude qui mêlait indifférence, complaisance ou mollesse face aux dérives antisémites dans le Labour commettait une faute politique et morale car l’hostilité résolue à l’antisémitisme et au racisme ne va pas de soi et il ne faut pas que des postures, il faut aussi des actes.
L’événement pouvait sembler isolé, jusqu’au discours de la Présidente de son groupe qui lançait à la Première ministre qu’elle était une « rescapée ». On imagine bien de quoi, c’est-à-dire de la bérézina politique qu’avait subie la Macronie, mais en ne finissant pas sa phrase elle s’exposait évidemment à de mauvais procès d’intention.
Là encore, ses plumes et ses collaborateurs, pour un discours si important puisqu’il était une réponse à une déclaration de politique générale, auraient dû redoubler de rigueur et, elle-même, aurait dû les écouter. Parler fort et parler n'est pas forcément parler juste et le confusionnisme c'est précisément ce que les démocrates conséquents ne peuvent pas pratiquer.
A l’inverse, le discours ciselé de Boris Vallaud, notamment, la salve contre l’extrême droite, restera et fera date, tout à l’honneur de la gauche républicaine.
Il ne fallait donc pas se tromper ce jour du 80e anniversaire.
La légèreté, l’imprécision et les mots choisis révèlent beaucoup de choses.
C’est bien le fait qu’elles étaient juives qui condamna les familles aux yeux de la police de Vichy et des Français, il y en eu puisqu’il y avait des enfants nés en France.
Quoiqu’on pense d’Emmanuel Macron et de ses erreurs d’expression notamment à l’égard de Pétain des calculs politiques qui ont conduit à l’élection du plus grand groupe parlementaire d’extrême droite de la Cinquième République, dans un tel moment, on ne manipule pas l’Histoire.
Sauf à être au premier rang des mobilisations contre l’antisémitisme, notamment quand celui-ci se niche dans certains discours anti-israéliens car, ça existe qu’on le veuille ou non.
De même, affirmer que « nous nous étions tant habitués à l’extrême-droite, au nationalisme, au fascisme et à l’antisémitisme, que la rafle du Vel d’Hiv a pu avoir lieu, organisée par la police française. Au vu et su de tous » apporte de la confusion dans la compréhension des faits.
Ce « nous » qui suppose une responsabilité collective française dont la nature a pourtant été maintes fois analysées par les historiens.
Il y a un donneur d’ordre, l’Occupant nazi. Un décisionnaire, le régime de Vichy qui pouvait ne pas collaborer et des exécutants. Tout mettre sur le dos de la police dans un registre évidemment « anti-flic » suinte évidemment le « toute ressemblance avec des faits actuels ou récents est tout sauf fortuite ».
Ainsi on dédouane Laval et ses complices, on met de côté le régime totalitaire qui s’était abattu sur le pays.
Bref, si les parlementaires ont pour mission d’écrire la loi, leur obligation c’est la précision dans les termes, la justesse dans le propos et la pédagogie pour bien se faire comprendre.
Il n’était pas possible qu’en hommage aux victimes, toute la gauche soit à l’unisson de la Nation ?
Il y a 80 ans pourtant, nous aurions tous été, malgré les maladresses dans les expressions, dans le viseur des nazis et de leurs collabos…
Encore une fois, commémorer la rafle du Vel d’Hiv n’est pas un acte « politiquement correct », cela doit avoir une signification tout sauf banal dans nos engagements militants, à gauche comme à droite.
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