Ce 27 janvier, cela fait 76 ans que l'horreur de l'univers concentrationnaire nazi a éclaté à la face du monde avec l'entrée des soldats de l'Armée rouge dans les trois camps du complexe d'Auschwitz Birkenau. Durant plusieurs mois, les troupes alliées allaient découvrir en Allemagne et en Pologne principalement, des dizaines de camps de concentration et d'extermination où, entre 1933 et 1945, plus de six millions de personnes furent détenues, réduites en esclavage, torturées et exterminées.
En 12 ans, un régime politique arrivé au pouvoir après des élections dans un climat de violence, a mis au pas un pays, l'Allemagne, qui rayonnait dans le monde entier ce qu'il avait apporté dans tous les domaines de la culture et du savoir. Le pays de Luther, de Bach, de Goethe, de Kant ou d'Einstein qui était devenu une dictature dont l'idéologie ne se fondait pas sur un fascisme "classique" pour l'Europe de l'époque, mais une obsession de la race qui provoqua la pire des horreurs.
La purification érigée en principe, mais surtout, engagée avec des modalités pratiques d'ordre industriel fut la marque du nazisme.
La mort est devenu un métier, une activité et une économie à grande échelle. La mobilisation des ressources technologiques disponibles à l'époque pour optimiser, accroître le rendement, tout cela au profit de la plus large entreprise de déshumanisation méthodique de l'Histoire humaine.
Décréter que la maladie, la religion, l'appartenance à tel ou tel peuple, l'orientation sexuelle ou les handicaps constituent un argument pour l'élimination, voilà la "novation" du nazisme. Et nous savons aujourd'hui qu'ils sont passé des paroles actes dans des proportions jamais atteintes, ni avant, ni depui.
Il faut sans cesse relire ces événements, les comprendre, les analyser pour en prendre toute la dimension. On ne peut pas s'y habituer. On ne peut pas non plus les relativiser ou les banaliser car les faits sont nets.
Des massacres de masse, du racisme d'Etat, du totalitarisme, l'eugénisme, ça a existé avant et après, et ailleurs. Personne ne l'ignore. Mais c'est seulement dans le nazisme que cela a fait système et qu'il y a eu une articulation aussi nette, une mécanique parfaitement huilée avec ses engrenages, ses courroies de transmissions et son carburant dont les émissions rejetées étaient précisément utilisées pour l'extermination et tout ce qui ne finissaient pas dans les fosses communes était... recyclé.
Cette économie vert de gris a fonctionné pendant quatre années si on ne prend que les centres de mise à mort. Si on fait ce calcul sordide qui consiste à diviser le nombre de morts dans les camps durant ces quatre années, on obtient pour chaque année, à peu près le nombre total de morts rien à Auschwitz-Birkenau sur toute la période, ce qui revient, rien que pour ce camp, à assassiner plus de mille personnes par jour... La mort n'était pas seulement un métier, c'était une industrie.
Nous sommes en 2021. Régulièrement, on apprend la disparition d'un des derniers témoins de ce cauchemar et à mesure qu'on s'éloigne dans le temps de ces événements, la mémoire et les enseignements de la Shoah et du Porajmos - et de tout ce qui s'est produit pour d'autres populations peuvent s'émousser.
Dans un mouvement contradictoire la Shoah est devenue le "mètre étalon" de l'horreur : ceux qui considèrent qu'on en parle trop sont souvent les mêmes qui s'en servent comme référence pour revendiquer une attention plus grande sur d'autres génocides. Cela veut bien dire que c'est un événement "à part".
C'est aussi la démonstration qu'Auschwitz n'est pas plus l'affaire des juifs seulement que celle de l'Europe ou de l'Occident. Ceux qui pensent cela croient qu'il s'agit d'une "punition" ou d'une responsabilité qu'ils n'ont pas à endosser. Pourtant c'est notre affaire, comme chaque fois que l'Humanité est dévorée par des monstres. Si ça s'est produit là, comme ça c'est que c'était la répercussion d'autres crimes, sur lesquels on s'est appuyé pour aller plus loin et, ce faisant, on a servi de référence, voire, d'exemple : il y a eu d'autres crimes contre l'Humanité, d'autres génocides depuis...
Ce qui se passe avec les Rohingyas ou les Ouïghours - deux minorités musulmanes d'Asie orientale en est le dernier exemple.
Il y a donc eu un chemin qui a mené à Auschwitz et qui en part et savoir où il nous mène est clairement une question de choix puisque l'Homme a cette capacité, contrairement à l'animal, d'avoir, en plus de son instinct et de ses pulsions, une conscience.
Nous avons toujours devant nous deux voies : la Vie et la Mort, à nous de choisir de vivre. Cela signifie que ce qui nourrit la haine et le rejet de l'autre est une déviance à laquelle il ne faut jamais s'habituer car arrive un moment où la banalité du mal produit le pire.
Les peuples ne se lèvent jamais spontanément contre l'injustice et dans nos sociétés modernes, la tranquillité compte toujours plus que la justice. Voilà pourquoi il faut retrouver le sens de la culture, ne jamais renoncer à la Politique et à l'engagement car d'autres n'y renoncent pas. Chacun de nous, là où il est, dans son quartier, son association, son parti, sa collectivité, sa famille, doit y jouer un rôle.
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