"Oh, ce ne sont que quelques nègres de plus"

La capture d'écran de BFM TV buzze sur les réseaux : une erreur de titre dans un sujet sur les noyés de la Méditerranée, un demi millier de personnes fuyant leur pays en guerre ou frappé par la misère : "un survivant, Premier secrétaire du PS". Cela invite à pouffer et les esprits indignés passeraient pour de petits susceptibles manquant d'humour.

Pourtant, on est en plein dans le cirque médiatique. Alors que l'avenir de LCI est en jeu, on pouvait avoir le débat sur l'influence des chaînes d'info continue qui ont profondément modifié notre rapport à l'information. L'urgence contre le recul et la réflexion... C'est pour plus tard, une fois que les dégâts ont fait leur œuvre... Le jeu des postures dans la microsphère politique est devenu un sujet d'amusement. Il fait le bonheur des humouristes, des chansonniers et des commentaires connectés. L'humour potache, le "décalé" ou le cynisme se sont imposés comme postures, moqueuses qui amusent les amateurs de bons mots qui ont rompu avec toute forme d'engagement.

Le choc entre la réalité du PS et celle du reste du monde est saisissant : on "lol" la photo de ce Noir "survivant, Premier secrétaire" sans trop savoir si c'est le côté "Noir Premier secrétaire" ou "survivant" qui fait rire. On en oublie pourquoi le bonhomme est à l'écran. Depuis le drame de Lampedusa, on sait que chaque mois, fuyant le Mali, la Libye, la Syrie et d'autres pays en guerre, des centaines de pauvres misérables tentent leur chance sur de frêles esquifs et se heurtent soient aux barbelés des frontières hispano-maricaines ou aux rivages de l'Italie qui s'est trouvée bien seule face à ce drame.

Quelques nègres à la mer dans une migration forcée entre deux continents, c'est une histoire déjà vue. Un "détail" même. On comprend, on observe une minute de silence et on passe au sujet suivant.

Pendant qu'on se regarde le nombril, c'est aux portes de l'Europe que se déroule un drame dans le silence général. La Commission européenne va devoir prendre des mesures car pour répondre à ce drame, ce sont les 28 qui devront agir ensemble.