Les soirées électorales ont quelque chose de sportif. On produit de l'analyse et du commentaire le nez sur l'événement pendant que le public, électeurs et militants s'expriment avec leurs tripes. Vote sanction dans une démocratie punitive, où le sens civique se perd tant l'élection ressemble â un piège à cons.
Pourquoi la gauche à telle perdu ? Les victoires du FN sont elles l'échec de la manière de combattre ? La défaite aux élections européenne est-elle inéluctable ? Le remaniement est-il la solution ?
Voilà les principales questions du moment, mais on se doute bien qu'il n'y a pas de recettes magiques et oui, redresser un pays mis à mal pendant dix ans ne se fait pas en vingt mois même si depuis vingt mois, les résultats de la politique de la gauche ne se voient pas encore alors que les conséquences de la politique de la droite, battue en 2012 se voient toujours.
François Hollande n'a certes pas été élu en 2012 pour gagner en 2014, mais les premiers résultats de la politique du gouvernement Ayrault ont violemment été sanctionné car les Français ne veulent plus laisser du temps au temps.
Le redressement du pays demande du temps et du courage et le prix à payer, comme l'aurait dit un dirigeant européen consister - en faisant les bonnes réformes, à s'attendre à perdre les élections. Mais aucun dirigeant, même le plus cynique ou le plus machiavélique, ne fait l'impasse sur des élections surtout quand elles sont municipales puisque c'est le point de départ de toute reconquête...
Pourquoi la gauche a-t-elle perdu ?
Parce qu'elle a été incapable de produire des résultats même partiels qui font sens pour son propre électorat. On peut annoncer la reprise économique par des chiffres et des tendances, mais tant que ça ne se voit pas sur la feuille de paie, ce qui ravit les économistes que d'autres économistes s'empressent de modérer n'existe pas pour les salariés et encore moins pour les chômeurs dont le nombre ne diminue pas.
La sanction de la "Loi Florange" montre bien l'incapacité de la gauche à tordre le coup à une pensée dominante dans les esprits. La gauche est tout autant incapable d'assumer l'exercice du pouvoir. Elle est divisée entre ceux qui pensent qu'elle trahit dès qu'elle gouverne et ceux qui croient que l'essentiel est d'être au pouvoir et que pour être de gauche, c'est l'intention qui compte.
La gauche a aussi perdu les élections car il y a une crise de leadership qui se caractérise par la désarticulation du lien Parti-gouvernement et par la dislocation dès sa formation de la dimension "équipe" gouvernementale. Là où sous Jospin on avait une "dreamteam", on a avec Ayrault une juxtaposition de personnalités - ce qui limite la dimension collective.
Enfin, et surtout, au rêve français sur lequel François Hollande avait fait campagne, n'a succédé aucun récit permettant de montrer que notre pays pouvait être gagnant dans la compétition internationale, fort de ses atouts économiques et de son modèle social. Trop souvent, le discours décliniste, pessimiste et défaitiste domine dans la parole publique, à droite et dans la presse.
Les victoires du FN sont être les échecs de l'antilepénisme ?
A l'évidence, quelque chose n'a pas fonctionné, mais il n'y a pas de surprise. La victoire du Front national est celle de la banalisation de son idéologie auprès de gens qui assument ne plus voter par simple colère, mais parce que désormais ils adhèrent aux idées de ce parti d'extrême droite et qu'ils sont indifférents aux leçons de morale et à la caractérisation du FN comme héritier des pires heures de notre histoire. Et ce ne sont pas les révélations sur les bras tendus de tel candidat ou la déclaration raciste de tel autre qui changent quoique ce soit. La banalisation du FN et la nonchalance dans l'action pour le combattre l'ont installé dans le paysage politique et la crise n'explique pas tout. En 1998, des présidents de régions de droite avaient été élus grâce au FN, en 2015, ce sont des régions qui pourraient basculer si on n'y prend pas garde car il n'a échappé à personne que dans certains territoires, la porosité avec l'UMP est réelle. Entre "anti" ne suffit plus. Il faut repartir au combat idéologique, politique et électoral. Facile à dire, urgent à faire et avec constance si possible !
Le remaniement quant à lui n'a de sens que si on remanie le programme et la stratégie avant de remanier les équipes. La politique n'est pas qu'une affaire de casting et de belles gueules. Gouverner pour quoi faire ?
La crise impose des remèdes de cheval, mais un peu comme la chimio, ils sont tellement rudes, qu'à la fin, on meurt guéri. La force des symboles est toujours essentielle en politique. Pour ces gens qui gagnent moins de 1 500 euros par fois, ce qu'un gouvernement a à leur dire ne réside ni dans l'intention d'un tract, ni dans l'intervention sur une chaîne d'info qu'ils ne regardent pas car ils travaillent ou ils sont occupés à éplucher les petites annonces.
Le fameux socialisme municipal qui avait doté le PS d'un maillage territorial unique aurait pu servir de vigie à un gouvernement trop souvent conseillé par des esprits ambitieux et insensibles à certaines réalités.
Le PS peut-il gagner les élections européennes ?
En politique, ne pas livrer bataille, même quand l'issue fait peu de doute, est une erreur. Autant il est stupide de faire comme s'il ne s'était rien passé aux élections municipales, autant il ne faut pas faire l'impasse, par pessimisme ou lassitude, sur les élections européennes.
Chacun a compris que le contexte européen pèse sur les politiques à l'échelle d'un pays. Si donc on veut faciliter les conditions du redressement, il faut desserrer l'étau conservateur et austéritaire pour imposer une nouvelle donne en Europe.
Il faut donc tirer les enseignements des municipales et le prouver par une stratégie qui se caractérise par de la clarté et de la détermination.
Les élections européennes c'est le choix entre l'Europe de l'austérité ou l'Europe de la solidarité qu'un demi milliard de personne choisiront le 25 mai prochain.
En félicitant l'UMP ce soir, Juncker a félicité un parti qui a gagné sans projet, avec un leadership contesté et des dirigeants divisés car cette victoire ne règle pas la crise de la droite. Or le programme européen de la droite n'est pas l'alternative, mais au contraire, la continuité.
La contestation en Espagne où un véritable "mouvement du 22 mars" agite les universités, les femmes et les victimes de l'austérité, faisant écho à celle qui secoue le Portugal depuis des mois doit trouver un débouché dans un vote utile.
Mais qu'on ne s'y trompe pas. Les élections municipales française ont un air de répétition générale car en écho aux élections locales néerlandaises d'il y a quelques jours et à une semaine des élections législatives hongroises, la tendance est claire : la social-démocratie peine à représenter l'alternative à la droite et les nationaux-populistes ont le vent en poupe. Même si le projet de Martin Schulz commence à être identifié, il ne s'est pas encore déployé.
Or les chose sont simples, si les Français votent pour la droite lors des prochaines élections européennes, ils conforteront le pouvoir européen qu'ils veulent pourtant changer.
Voilà pourquoi, il ne faut pas louper le rendez-vous du 25 mai ! Pour cela, le PS doit montrer qu'il a entendu le message.
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