Les réseaux sociaux ont ceci d'intéressant qu'ils permettent aux gens d'exprimer ce qu'ils pensent et même lorsqu'il s'agit de rivaliser d'originalité pour ne pas passer inaperçu, cela révèle bien évidemment quelque chose. Mandela n'est pas encore enterrée que l'on débat déjà de son héritage...
Il y a ceux qui se sont insurgé contre une certaine "hypocrisie" en démasquant les combattants anti-apartheid de la dernière heure, soulignant qu'il n'y avait pas beaucoup de monde dans les années 80 pour se mobiliser. C'est juste, mais c'est vrai pour beaucoup de causes justes dont le caractère incontournable n'apparaît pas aux yeux de tout le monde tout de suite. On a envie de leur dire "mieux vaut tard que jamais".
Il y a ceux qui, dans le même ordre d'idée, contestent la présence de Nicolas Sarkozy. Du discours de Dakar au discours de Grenoble, l'ancien président de la République, n'a pas marqué les esprits par son antiracisme militant dans la mesure où il restera dans l'Histoire comme celui qui a fait le plus de concessions à la libération de la parole raciste.
Si des gens sans boussole ont pu comprendre à travers ce personnage et ce qui a été évoqué à l'occasion de sa mort que le racisme est une horreur et qu'on peut reconstruire un pays sans haine, c'est déjà une très grande victoire.
Le Front national, par la voix de Bruno Gollnsich a rappelé sa parenté avec les inventeurs de l'apartheid et la reprise de la phraséologie du parti de Verwoerd et Botha - qualifier l'ANC "d'organisation terroriste" était là pour le prouver.
Enfin, il y a eu ceux qui ont fait le lien entre la situation en Afrique du Sud et celle qui a cours en Palestine. Certes certains leaders de l'ANC y voient des similitudes avec ce qui a existé dans leur pays. 1948 est à la fois l'année de la fondation de l'Etat d'Israël et le moment ou le système de l'apartheid s'est installé durablement dans ce qui n'était pas encore la République sud-africaine.
Les partisans de la cause palestinienne en quête d'images fortes voient dans cette analogie un argument de poids. On a déjà évoqué sur ce blog notre désaccord, même si le ressenti des populations ne s'embarrasse pas de ces précautions.
Netanyahu a commis une erreur politique en invoquant l'argument "financier" pour ne pas aller à Johannesburg. Il a donné inutilement des bâtons pour se faire battre.
Quant à Marwan Barghouti en qui certains voient un autre Mandela, il est clair que l'ancien leader de l'intifada a gagné une stature internationale d'autant qu'il est une figure d'unité du mouvement national palestinien. Même du Fatah - parti membre de l'Internationale socialiste et observateur du Parti socialiste européen comme Avoda et Meretz, il est un camarade et de même que l'IS avait joué un rôle déterminant dans les premières discussions entre Israéliens et Palestiniens avant les accords de Madrid, de même, l'avenir ne s'écrira pas sans Barghouti.
Tout cela pour dire que l'esprit de Mandela nous commande de nous élever au-dessus des controverses qui ne font pas avancer la cause. La question n'est pas de pointer du doigt le passé de Sarkozy et de tous ces gouvernements conservateurs occidentaux (et parfois progressistes) qui ont fermé les yeux sur l'apartheid tant que l'Afrique du sud était entouré de pays en proie à la guerre civile où s'affrontaient révolutionnaires marxistes et forces soutenues par l'Ouest. Il ne s'agit pas non plus de dénoncer confortablement derrière son ordinateur "l'apartheid en Israël et dans les Territoires palestiniens", mais de savoir comment on crée les conditions pour que le processus de paix qui a été rouvert peut enfin aboutir cette fois.
Voilà l'esprit de Mandela, voilà une éthique pour la politique : s'obstiner non pas à caractériser son ennemi, mais faire la paix avec lui.
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