Nous sommes à Lisbonne pour une réunion de la présidence du Parti socialiste européen. C'est une idée de nos camarades portugais à la veille de leur congrès qui correspond au quarantième anniversaire de la refondation du PS portugais.
Ce soir, avec quelques camarades, grecs, français, belges et irlandais, nous avons dîné à proximité d'un des lieux phare de la Révolution des Œillets. Ce lieu où la PIDE avait ses locaux je crois et où la foule s'était rassemblée, en appui à ces vaillants capitaines d'avril pour réclamer la reddition des derniers soutien du régime. Déjà ce soir, quelques personnes se rassemblent, un œillet à la main.
Etre au Portugal pour le 39e anniversaire de la Révolution des Œillets n'est pas sans émotion. C'est une pensée pour nos frères qui, en 1974, ont chassé la dictature instaurée depuis 1926 par Salazar et ont fait éclore une démocratie exemplaire car ici, contrairement au grand voisin espagnol, le principal parti de droite n'est pas truffé de nostalgiques de l'ancien régime...
C'est aussi un moment d'humilité et de fierté car je pense à mes camarades portugais vivant en France et cette fraternité qui unit depuis toujours les deux PS. L'amitié qui unissait Mitterrand et Mario Soares dont le nom a toujours incarné pour notre génération, à la fois le socialisme portugais et l'honneur retrouvé d'un grand peuple. D'ailleurs, seul l'orateur socialiste, le député Alberto Costa, a évoqué le rôle du MFA...
Nous avons vibré au rythme des révolutions arabes. Il y a 40 ans, c'était en Grèce, en Espagne, au Portugal...
Porter l'œillet rouge de rigueur en ce jour est un grand moment de fierté où nous nous associons anonymement à nos frères et nos soeurs du Portugal et où j'ai pu revoir mes amis Rui et Paulo maintenant députés.
Le Portugal, longtemps cité en exemple des réussites européennes ou comment les fonds structurels avaient permis de rattraper les retards espagnol, portugais ou grec, jusqu'à ce que la cris vienne mettre un terme à ce récit sur la solidarité européenne.
Pour avoir une idée de l'état de la crise, les jardins des palais de Bélem et de São Bento, où réside l'exécutif, habituellement ouverts au public, ont été fermés.
L'anniversaire de la Révolution est un moment d'unité nationale et de souvenir de l'importance du combat pour la démocratie. La crise est elle que ce consensus est disloqué. D'ailleurs, le président de la République, Anibal Cavaco Silva donne lui-même des coups de canif en appuyant les réformes du gouvernement. Il avait appelé à la fin de la législature de Socrates le peuple à descendre dans la rue, maintenant, il demande aux gens de courber l'échine. Les conservateurs du PSD ont franchi un pas supplémentaire dans la provocation par le fait que le discours du parti au pouvoir a été fait par Carlos Abreu Aborim, connu pour être l'incarnation détestable de l'aile la plus réactionnaire de la droite portugaise...
Jamais le pays n'avait été aussi faible depuis la décolonisation. Le gouvernement conservateur, appuyé par une presse conservatrice, est tellement impopulaire qu'en plus des élections municipales prévues à l'automne, on envisage des élections anticipées.
La démocratie est tôt ou tard fragilisée quand la misère s'étend et en ce jour, il faut s'en souvenir pour agir.
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