Il y a quelques jours j’écrivais ici même « La fièvre des contributions gagne les socialistes, un exercice à la fois narcissique et politique. Positionnement tactique ou effort d'élaboration intellectuelle, c'est un exercice démocratique que de nombreux militants prennent au sérieux et cela produit souvent des textes de qualité, même si pour l'essentiel ils tombent dans l'oubli. Beaucoup produisent des textes intemporels comme si leurs auteurs s'étaient tenus à l'écart du PS ces trois dernières années, croyant le retrouver comme ils l'avaient laissé. »
Je ne me suis pas trompé, mais ceux qui ont écrit sont souvent sincères. Pourtant, l’écart entre les « tâches essentielles » et les aspects superficiels est si grand qu’on pourrait presque désespérer.
Dans la grammaire des congrès socialistes, l’expression par voie de contribution générale permet de « poser des actes » ou de se faire remarquer. Mais cela se poursuit peu dans la durée.
Il semble que les tâches essentielles du Parti socialiste dans la période qui vient ne portent pas, pour une fois, sur le programme ou l’orientation, mais plutôt sur l’articulation entre le parti et le pouvoir, d’un part et le parti et le pays d’autre part.
Comment faire tenir ensemble un parti présent dans la majorité des collectivités locales, se faire l’écho des impatiences et des exigences et aider le gouvernement à tenir ses promesses tout en préparant les étapes suivantes.
Tout le monde a saisi qu’il faudra savoir durer sans s’user et chacun doit contribuer à inventer la réponse.
Il faudra lire les textes au lieu de se moquer des postures.
Ce qui frappe ces derniers jours c’est ceux qui envoient à la terre entière des messages pour ramasser des signatures sans jamais proposer une discussion sur le texte en question. Tous ne font pas cela bien heureusement…
J’ai décidé de soutenir, pour peu que cela apporte quoique ce soit au débat, la contribution Aubry Ayrault. Pour deux raisons.
La première c’est par fidélité à Martine. Nous terminons avec Toulouse une séquence commencée à Reims avec les Reconstructeurs. Notre objectif a été atteint. Nous avons protégé le parti de la présidentialisation en lui permettant de se remettre au travail et de proposer au pays un projet nouveau. Cela a été visible et lisible. Le projet ainsi adopté a permis que les primaires soient un succès et que les élections nous mènent à la victoire. Ce n’était pas gagné d’avance. C’est donc par gratitude envers la première secrétaire, mais aussi en solidarité avec tous ceux qui, motion D issue de Reims, mais aussi compagnons de route dans la primaire qu’il fallait dire au parti ce que nous avions fait et ce qu’il restait à faire. Ceux qui pensent qu'il faut rayer Reims de l'Histoire et prendre leur revanche se trompent et trompent les militants.
La deuxième raison c’est parce qu'à mes yeux, le congrès de Toulouse sera moins tactique que celui de Reims. Il imposera au PS probablement un pas supplémentaire vers la social-démocratie comme l'avait fait celui de 1985, et dans la mesure où puisque nous venons de gagner ce n'est pas tant la question de la définition du programme qui est posée que celle de sa réalisation dans la durée et de l'invention d'une méthode pour tenir les deux bouts de la chaîne : maîtriser les temps du gouvernement et gérer les moments du mécontentement. D'ailleurs, l'aile gauche du PS, d'habitude plutôt chauvine, ne s'y est pas trompé en cherchant à consolider son texte par le soutien annoncé de plus d'une vingtaine de parlementaires sociaux-démocrates allemands.
Seuls les partis sociaux-démocrates ont gouverné longtemps au point d'imprimer leur marque à l'ensemble des sociétés qu'ils dirigeaient. C'est cela qui leur a permis, de maintenir une forme d'hégémonie face au libéralisme et aux conservatismes.
La fidélité ou le soutien n'interdisent pas la lucidité et la lucidité n'est pas le scepticisme. Nous ne devons pas oublier d'où nous venons. Il faudra que l'inspiration qui pousse à prendre la plus lors des congrès se prolonge après pour le bien commun.
Cette nouvelle position du PS lui donne aussi un poids sans précédent à l'IS et au PS dont il doit faire quelque chose. Dans la contribution Aubry Ayrault, les propositions pour renforcer l'intégration européenne du PS sont d'une pertinence admirable. Nous avons les moyens de le réussir.
Au pouvoir comme dans l'opposition
C'était le credo de Göran Persson, l'ancien premier ministre suédois qui était issu d'un parti social-démocrate qui a gouverné plus de 50 ans seul. Pour y parvenir, il est juste de dire que les ministres seraient mal inspirés de croire qu'ils sont au dessus des débats du PS, ou qu'il faut faire comme si on n'était pas pouvoir, voire considérer le Bureau national comme une annexe du conseil des ministres. Tout cela n'est pas simple.
Je crois donc que ce qui compte c'est de construire ce rapport au pouvoir pour que le PS soit utile. Nous aurons plus besoin d'être déterminés et opiniâtres que raisonnables et modérés.
Enfin, je crois que maintenant, on peut aller plus loin que jamais sur beaucoup de sujets. Il peut donc y avoir trois chantiers à ouvrir lors de conventions nationales :
Quelles relations entre l'Etat et les territoires pour un développement solidaire ?
Comment faire émerger de nouveau cadres ? C'est-à-dire comment passer des proclamations aux actes en formant une génération de femmes et d'hommes aux couleurs de la France pour qu'il accèdent- un jour à des responsabilités politiques en étant jugés sur leurs talents et plus sur leurs origines ?
Comment réussir le développement de l'outremer ?
Voilà pour commencer...
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